L'AGRICULTURE PENDANT LA SAISON SÈCHE AU BURUNDI, LES DROITS FONCIERS DE LA FEMME POURRAIENT EN FAIRE UN SUCCÈS AUJOURD'HUI
Très récemment, le premier ministre burundais vient d’appeler à la population de cultiver la terre pendant la saison sèche. Les questions qui ont été posées sur la façon dont cela serait possible incluent le fait que sans la pluie, il est quasiment impossible de travailler la terre (la population n’exploite que les marais pendant cette saison). Je suis sûr que beaucoup d'autres questions auraient pu être posées, surtout en ce qui concerne le fait que beaucoup de Burundais se sont habitués, à tort, à une culture théorique selon laquelle les gens ne cultivent pas les terres autres que les marais, sauf lorsqu'il pleut.
Un homme m'a témoigné : " J'ai grandi dans un environnement où nous travaillions dur pendant les saisons des pluies, mais où nous pouvions nous asseoir et jouer pendant beaucoup plus de jours pendant la saison sèche. Je ne savais pas qu'il n'y avait pas de période spécifique pour l'agriculture jusqu'à ce que je vive dans un autre pays où il n'y a que des mois de pluie. Mais ce que j'ai vu là-bas, c'est que chaque année, chaque mois, des produits frais sortent de leurs champs parce qu'on leur a appris que la pluie ne conditionne pas l'agriculture, alors que l'eau et l'irrigation le font... c'est tout. Il suffit d'avoir de l'eau et nous avons plus d'eau au Burundi que dans beaucoup de pays d'Afrique "
Au Burundi, l'économie repose davantage sur la gestion de la terre. Ce dont on peut être sûr, c'est que si l'on s'attaque à ces conceptions erronées et à ces cultures théoriques en faisant comprendre aux gens que l'agriculture dans toutes ses dimensions ne stimule pas seulement l'économie mais aide aussi les Burundais individuellement, l'économie et donc le développement du pays connaîtraient un essor sans précédent. Ce pays serait une étoile brillante sur le continent en tant que pays qui nourrit bien sa population et peut fournir sur le marché régional, continental et mondial des produits agricoles.
L'AFFIRMATION LÉGALE ET LA PROMOTION DES DROITS FONCIERS DES FEMMES, UN AUTRE FACTEUR DE RÉUSSITE DE L'AGRICULTURE ET DE DEVELOPPEMENT COMMUNAUTAIRE AU BURUNDI
Au Burundi, les hommes s'impliquent peu dans les activités agricoles et domestiques. Ceci est dû aux stéréotypes et à une mauvaise conception de l'égalité de genre. Cette conception est allée jusqu'à empêcher les femmes de revendiquer et de vivre officiellement et légalement leurs droits en matière de droit de propriété et de gestion foncières à l'échelle nationale. Il est difficile de comprendre, mais c'est un fait, que les femmes sont à plus de 80 % celles qui exploitent la terre au nom des familles sans bénéficier des fruits de cette terre en tout droit réel.
La mise en place d'un cadre légal et le fait de faire tout ce qu'il faut pour que le gouvernement le fasse garantiraient le succès de la gestion des terres pendant la saison sèche. Si les femmes étaient légalement autorisées à hériter de la terre, et dans d'autres cas, si elles obtenaient facilement le droit d'acheter, de posséder et de jouir des terres dans ce pays, cela renforcerait leur confiance et plus d'efforts seraient fournis pour une exploitation stratégique des terres comme jamais auparavant. Sur ce point, l’opinion est presque unanime et un exemple récent de l’analyse d’un expert dans un article du Journal IWACU https://www.iwacu-burundi.org/le-droit-dheriter-de-la-terre-pour-la-femme-burundaise-constituerait-un-facteur-de-justice-sociale-et-un-atout-au-developpement/ est l’un des cas en faveur de cette nécessité.
LADEC, à travers ses actions via la composante 'Certification foncière' du Projet de Restauration et de Résilience du Paysage du Burundi, et le projet en cours " Projet Prévention et Résolution des Conflits Fonciers " a recueilli des témoignages de femmes dans toute la zone d'action suggérant une prise en compte plus sérieuse de cet aspect et nous pensons que cette nécessité n'est pas seulement ressentie dans les seules zones d’intervention de ces projets mais aussi dans d'autres régions où la certification foncière est nécessaire surtout dans les zones rurales. Dans la vidéo ci-dessous, nous en apprenons plus sur l'importance de cet aspect.
Le fait que l'accès des femmes aux droits fonciers contribue à une réduction satisfaisante des conflits fonciers implique explicitement qu'il contribue aussi grandement au développement de la communauté. Une fois qu'une femme sait qu'elle a tous les droits pour exploiter la terre, cela signifie qu'elle n'aura pas peur d'entreprendre des projets de développement et qu'elle deviendra un pilier du développement social et communautaire global.
LES STRUCTURES SOCIALES ET RELIGIEUSES DEVRAIENT AIDER LES FAMILLES À COMPRENDRE QUE LES DROITS FONCIERS DES FEMMES SONT DES DROITS FAMILIAUX.
Lorsque vous discutez avec les autorités religieuses, elles sont d'abord réticentes parce que certaines d'entre elles sont au courant de ce que disent les documents juridiques sur les droits des personnes. La loi burundaise spécifiquement le Code des personnes et de la famille en son article 126 interdit à l’un des conjoints de disposer d’un immeuble de la communauté conjugale sans le consentement de l’autre conjoint même en cas d’enregistrement de la propriété en son nom. La Jurisprudence foncière récemment publié par la Cour Suprême vient de renforcer cette disposition à travers la thématique « l’accord préalable du conjoint du vendeur ».http://ladec.bi/images/document/Jurisprudence_foncire_vf_compressed_1.pdf). Si alors les structures religieuses et sociales comprenaient bien cela, ça pourrait grandement aider à démythifier le concept infondé de dénigrement des droits des femmes et ce que les autorités burundaises font appel à la population pour l’agriculture pendant la saison sèche trouverait un argument renforcé et grande justification pour être possible. Il est toutefois nécessaire d'accompagner la population et de superviser les efforts et la technicité mis en œuvre pour sa réussite.